Kombissiri : Un projet communal détourné à des fins privées

Publié le mercredi 20 février 2019 à 11h22min

PARTAGER :                          
Kombissiri : Un projet communal détourné à des fins privées

Le conseil municipal de la commune de Kombissiri a tenu une session extraordinaire le mardi 19 février 2019, pour auditionner un rapport d’enquête d’une commission ad hoc chargée de rechercher des informations et de faire des propositions au conseil municipal sur la situation du lycée construit par la coopération belge à travers l’Association pour le soutien à la production durable (ASPD).

C’est l’histoire d’un lycée construit au nom de la commune de Kombissiri par l’Association pour le soutien de la production durable (ASPD), financé par la coopération belge et qui se retrouve entre les mains d’un privé. Après avoir été désignée par la coopération belge comme intermédiaire dans le projet, pour exécuter et rendre compte, l’ASPD a pu obtenir les autorisations de construire et de créer un établissement secondaire privé à l’insu de la mairie de Kombissiri. Après sa construction, le lycée a été vendu par le président de l’ASPD à un particulier de la commune en 2012. Depuis lors, la question ne cesse de susciter des débats au sein de la population.

C’est ainsi que, suite à des discussions menées au sein du conseil municipal relatives à la réalisation de ce collège au profit de la commune par l’ASPD sur financement de la coopération belge, il a été décidé de créer une commission ad hoc dirigée par Tiga Fréderic Zida, en vue de fournir des éclaircissements sur cette affaire de collège qui s’est passée en 2012, c’est-à-dire quatre ans avant la mise en place du présent conseil municipal.

Cette commission doit effectuer des recherches documentaires, des analyses et des conclusions sur les prétentions de propriété accordée à la commune sur le collège en question. Elle devra faire des recommandations allant dans le sens de résoudre le problème de propriété du collège, même si le dossier devrait être appuyé ultérieurement par une décision judiciaire.

A l’issue des travaux de la commission, il ressort que l’ASPD a un récépissé fictif et ne dispose pas de statuts et règlements intérieurs. Le président de l’ASPD était titulaire de trois casquettes à la mairie au moment de la signature de l’accord (conseiller municipal de Kombissiri, président du programme de coopération internationale et président de l’association qui fournit des prestations à la mairie et la représente auprès des partenaires financiers et techniques).

Il ressort en outre que pour la majeure partie des actions de l’ASPD dans le cadre du projet, c’est son président Momouni Nikiema qui les accomplit et de manière solitaire sans la participation des autres membres de l’association. La commission ad hoc chargée d’enquêter sur l’établissement écrit : « Nous avons cherché à rencontrer les membres du bureau, mais il semble que l’ASPD ne fonctionne plus, et les quelques membres survivants ne reconnaissent pas leur statut de membre effectif du bureau ».

Il reste cependant que la mairie devait être au courant de ses agissements, et a collaboré certainement à la mise en place du Projet de développement local participatif dans la commune de Kombissiri (PDLP), phase 1. En ouvrant l’enquête, le conseil a voulu aussi apporter des précisions sur sa responsabilité dans cette affaire. Le maire de la commune, Hamidou Olivier Conombo, souligne que « notre conseil qui est mis en place en 2016, n’a pas retrouvé de traces écrites entrant dans le cadre de la collaboration mairie-ASPD, pour la construction de cette école. Cela s’est passé à l’époque du défunt maire Macaire Zabré qui est celui-là même qui connait le fond du dossier ».

En rappel, c’est en 2006 qu’un protocole de coopération a été signé entre la commune de Habay en Belgique et la commune de Kombissiri, avec pour objectif de promouvoir les domaines de la santé, de l’éducation, de l’assainissement, et de l’environnement. C’est ce projet de développement local d’un montant de 70 millions de F CFA destiné à la réalisation de plusieurs structures publiques comprenant le lycée, qui a été détourné pour ne construire que le lycée et un poulailler.

Dans ses investigations, la commission a aussi pu réunir un certain nombre de papiers dont les créations de compte, les transactions faites par la Belgique dans le compte de l’ASPD, les autorisations de construire et de créer l’établissement privé, les factures de construction et bien d’autres documents attestant que le lycée est privé et est au nom de l’ASPD. La commission ajoute que les travaux étaient directement contrôlés par le représentant de la commune belge de Habay.

La commission conclut que « la mairie de Kombissiri n’est nullement impliquée dans la réalisation de ces travaux, même si on prétend qu’elle est partenaire ou même propriétaire de l’œuvre en construction, puisqu’aucun document attestant que des accords sont passés entre la mairie et la coopération pour rétrocéder la gestion du projet à l’ASPD n’existent nulle part ».

Sur ses conclusions, le conseil a instruit le maire et ses collaborateurs de joindre par écrit et par mail, la commune partenaire de Belgique pour savoir à qui elle octroie l’établissement. C’est à l’issue de sa réponse que des procédures de retrait ou d’abandon pourraient être engagées.

En marge de la session, le conseil municipal a délibéré sur des questions foncières qui posent des problèmes de gestion des propriétés foncières. Pour ce faire le conseil suggère d’éviter les attributions de terrain sur un rayon de dix kilomètres de Kombissiri jusqu’à nouvel ordre.

Etienne Lankoandé (stagiaire)
Lefaso.net

PARTAGER :                          
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique